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ASSISES DE L’OISE : ASSASSINAT D’AISSAM

Le 24 février 2015
ASSISES DE L’OISE : ASSASSINAT D’AISSAM

Avocat Beauvais Ledru

 
Quatre jours d’audience auront suffi à convaincre la Cour d’Assises de l’Oise, d’une part du principe de culpabilité des cinq accusés, d’autre part de leur intention homicide et enfin de la circonstance aggravante de préméditation.
Avocat Beauvais Ledru
 
J’assiste donc l’un des cinq accusés, Maxime, le frère du tireur, Mathieu mais aussi le meilleur ami de la femme de la victime.
Avocat Beauvais Ledru
 
A l’origine, des différends avec la victime, Aissam. En effet, Maxime ne supporte pas qu’il cogne quotidiennement sur Christina. Elle est comme sa sœur, dira-t-il durant l’enquête. Pour ce qui concerne Mathieu, le différend concerne une dette d’argent en lien avec du recel de cambriolages.
Avocat Beauvais Ledru
 
Pour les autres, rien de très précis sur ce qui pourrait les opposer à Aissam. Toujours est-il qu’alors que ce dernier n’a pas honoré son rendez-vous à Beauvais avec Mathieu, se monte progressivement une expédition punitive avec la ferme intention d’en découdre avec Aissam, quitte à devoir se déplacer jusqu’à Feuquières, distante d'une trentaine de kilomètres.
Avocat Beauvais Ledru
 
Aux frangins, se greffent progressivement leur cousine Julie, que Maxime considère comme sa sœur jumelle, qu’il surnomme « mon bébé », leur cousin Clément et un ami de celui-ci, Wilfried.
 
Avocat Beauvais Ledru
 
Alors qu’ils s’apprêtent à partir vers Feuquières aux alentours de 22h00, Maxime sort du travail, une crêperie de Beauvais et rejoint le groupe de quatre. Il apprend alors que le projet d’en découdre avec Aissam Z. se concrétise, à l’instar de la crainte que ce bébé de 120 kilos inspire.
 
L’effet de groupe conjugué probablement à quelques bédos pour certains, la belle Julie qu’il faut séduire pour un autre, incite les cinq – après que la présence de Maxime et Julie eut été discutée, ceux-ci ne sachant pas se battre – à prendre la direction de Feuquières, Clément au volant.
 
Pendant ce temps, Aissam a cassé sa carte Sim en deux l’après-midi histoire d’être définitivement injoignable… ce qui va définitivement faire monter la tension.
 
En chemin, les insultes volent à propos d’Aissam, dans une sorte de surenchère. Puis, il est discuté d’une arme dont il faudrait s’équiper, car Aissam détient toujours un couteau sur lui. C’est Wilfried qui fournit un fusil à pompe, canon et crosse sciés, l’expert balistique enseignant durant l’audience que cela permet de le dissimuler plus facilement sous un vêtement...
 
Arrivés sur place, nous sommes le vendredi 4 mai, il est un peu plus d’une heure du matin, la température n’atteint pas 5 degrés, la voiture se stationne dans une rue inhabitée de Feuquières, longeant l’entreprise SAVERGLASS.
 
Wilfried enseigne à Mathieu comment se servir de l’arme, car ce dernier a déclaré être d’accord pour tirer. Les deux jeunes garçons enfilent cagoules et gants alors que pendant ce temps-là, Maxime et Julie parcourent la centaine de mètres qui sépare la maison d’Aissam de la rue sombre où la mort vient tout juste de se poster.
 
Une fois chez Aissam, Maxime lui indique qu’il détient l’argent qu’il lui doit, à savoir 80 euros mais que ladite somme se trouve non loin de là, dans la voiture. Le petit frère de Christina et son ami sont au domicile. Aissam enfile alors un blouson et suit Maxime et Julie.
 
Une fois dans la ruelle inhabitée, Aissam est pris au piège. Mathieu tire à deux reprises, une première munition à multi-projection contenant de la grenaille et qui blessera mortellement Aissam à la poitrine, une seconde munition contenant une balle et qu’il recevra au niveau du flanc.
 
L’équipe de cinq quitte rapidement les lieux, chacun rejoignant son lieu de vie. Julie et Mathieu dorment chez Maxime, à Beauvais. Ils s’affrontent tous deux à Call of Duty.
 
Au petit matin, grâce aux témoignages de Christina –  que Maxime a appelé en panique juste après la commission des faits en lui indiquant qu’il était arrivé un drame – et de son petit frère Roman, les jeunes gens sont interpellés.
 
Près de trois ans d’enquête, autopsie, auditions, confrontations, reconstitution, expertises et j’en passe, aboutiront à ces quatre jours d’audience durant lesquels l’on aura à s’interroger sur le fait de savoir si les cinq accusés ont eu la ferme intention de tuer Aissam avec la circonstance qu’ils avaient préparé leur crime, ou s’il s’agit de blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Au bout du couloir, la peine encourue n’est évidemment pas la même.
 


L’immaturité de Maxime, ayant des projets farfelus tels que celui de devenir mannequin ou encore gogo-dancer,

le suicide de son frère Pierre alors qu’il avait treize ans,

le chemin de la délinquance dans lequel Aissam marchait depuis quelques années entre cambriolages, drogue et violences conjugales,

l’expédition punitive réfléchie sans Maxime alors qu’il est encore au boulot à servir des galettes bretonnes,

l’intention initiale d’aller à Feuquières sans Maxime et Julie,

le fait qu’à part Maxime et un peu Julie, les trois autres se moquent bien des violences subies par Christina,

le fait que quand Maxime parle, c’est selon Clément « pour dire que de la merde »,

les mensonges de Christina durant l’enquête pour s’éviter un sort judiciaire ennuyeux,

l’appel de Maxime à Christina vers 22h par le biais duquel elle apprend que l’expédition punitive contre Aissam se prépare sans pour autant l’en prévenir,

l’arme qui « tombe du ciel » dans la mesure où Wilfried n’est présent que parce qu’il est allé avec Clément sur Beauvais pour se faire couper les cheveux,

le fait de revêtir une cagoule laissant penser qu’on ne veut pas tuer (le cas contraire laissant croire qu’on veut cacher son identité à quelqu’un qui ne pourra pas la révéler étant mort…),

les incertitudes sur la présence d’Aissam à son domicile, sur le fait de savoir s’il est seul, s’il est armé, s’il va accepter de suivre Maxime, ce qu’il a dans les poches de son blouson,

la certitude sur ce que dira Maxime à Christina au téléphone, à savoir qu’ils se sont battus mais que c’est plus grave que ce qu’ils ne pensaient,

sa panique, celle de Clément qui dit « Vous êtes malades, là c’est grave là, c’est meurtre, on va tous aller en prison »,

le souci d’apaisement de Maxime l’après-midi,

le fait qu’il a connaissance de l’existence d’une caméra de vidéosurveillance sur le parking de la société SAVERGLASS,

le fait de se dire que Roman et son ami l’ont vu,

son ignorance sur le fait de savoir si l’arme était chargée,

l’absence de version commune ou de faux alibis par le groupe de cinq,

le fait de rentrer dormir chez soi plutôt que de fuir,

le fait enfin que selon l’enquêtrice sociale, Maxime, à l’évocation des faits, « se met instantanément à trembler fortement »,

le fait qu’Aissam avait une mère, des sœurs, des frères, le fait qu’il avait un fils, Wassim, prénom qui ressemble à celui de Maxime, converti à l’islam sous le prénom de Nassim…
 


Maxime ne savait pas, ne voulait pas. Dans son esprit, il s’agissait d’un gros coup de flippe contre Aissam. Peu importe, en droit, que vous acceptiez d’être complice (guet-apens) de violences (tirs) avec arme (fusil) en réunion (à plusieurs) et que le résultat atteint aille au-delà de votre intention. Si vous acceptez d’être complice de violences et que la victime meurt, la Justice considère que vous êtes complice d'assassinat, si tant est qu'il soit démontré que le tireur avait bel et bien l'intention de tuer, ce qu'a estimé la Cour d'Assises de l'Oise.


Maxime est condamné à six ans d'emprisonnement pour complicité d'assassinat, c'est à dire meurtre avec préméditation. Son frère écope de 12 années de réclusion criminelle. Les peines sont jugées équitables par tous, moi y compris.



ACTU VIDEO SUR L'AFFAIRE :

https://www.youtube.com/watch?v=wKYifJvGtp0